Boom ! Les résultats des élections pour le renouvellement partiel du Sénat viennent d’exploser à la figure de la majorité. Même si le Nouveau Centre a progressé en nombre de sénateurs avec quatre élus supplémentaires, outre la réélection des trois sortants, passant ainsi de 9 à 13, ce lundi avait un goût amer.
Une des causes de ce renversant renversement est la sourde résistance des élus territoriaux à la réforme locale. Et ce sont eux les électeurs du Sénat. Elle menace quantité de situations, par la simple réduction des postes. Erreur tactique, mais pourtant nécessité stratégique. Parce que cette réforme, insuffisante d’ailleurs, est absolument nécessaire.
Le paradoxe pour les girondins que sont les centristes, adeptes de la décentralisation, est que celle qui a été réalisée à partir de 1983 a tout simplement créé des féodalités, des prébendes, des rentes de situation. En trente ans, et surtout dans les 15 dernières années, un mille-feuille administratif s’est mis en place. On a multiplié les fromages pudiquement appelés « syndicats » ou « communautés » ou « agglomération », etc. Partout des présidences -rémunérées- des vice-présidences – également rémunérées. Partout surtout la multiplication des fonctionnaires territoriaux. Il n’est aucun roitelet qui ne veuille avoir dans sa mairie quantité de têtes dociles qui obéissent à ses directives, qui courent et s’agitent et lui donnent le sentiment d’exister. Les sots de gauche (nombreux) et les sots de droite (également nombreux) se sont fait concurrence dans l’embauche débridée. Les effectifs de la région ont explosé. Ceux des communes ont explosé. Dans notre agglomération on pourrait se livrer à la même analyse pour les communes. Quant à la communauté de communes devenue Agglomération avec un grand A et beaucoup d’emphase, il n’y a pas longtemps son excellent président dans une interview rappelait qu’à l’origine le syndicat gérant l’eau pour les 6 premières communes comptait 4 préposés, et aujourd’hui la structure en compte plus de 300. C’est un désastre.
À ce point de la problématique, le même président soutient que l’Agglo (sic) a beaucoup plus de compétences. Par exemple le transport. Sauf que le transport est dans la réalité concédé à un délégataire de service public et que pour l’essentiel les bureaux qui s’en occupent dans la structure administrative, passent commande à des bureaux d’étude externes. On est fou.
Et de construire, et de loger tout ce monde, et de vouloir au contraire multiplier encore les commissions, les machins, et surtout les in-dem-ni-tés.
Et quand vous avez un fromage, qui non seulement vous nourrit financièrement, mais en plus gonfle votre égo et fait de vous, un obscur, d’un seul coup un « chef d’entreprise », et un gros chef d’entreprise, qui en prime vous donne du pouvoir, alors vous entendez le conserver. De ce fait si un gouvernement intrépide, pour le coup on pourrait même dire téméraire, veut rationaliser le machin, il devient votre ennemi personnel. Et derrière c’est la claque sénatoriale.
C’est la mort dans l’âme qu’il faut se rendre à l’évidence de l’échec patent de la décentralisation en France, telle qu’elle a été réalisée. Elle doit être réinventée. Elle doit l’être sur des bases plus saines. Il y a deux maux majeurs qui ont sapé l’édifice. D’abord les prébendes, le côté fromage. Et pour lutter contre cela c’est simple : faire comme nos voisins. Les élus ne reçoivent aucune rémunération. Je sais que j’exagère, les indemnités ne sont pas totalement inutiles. Et le second s’appelle cumul des mandats. Sur ce point des progrès s’accomplissent, mais il reste le cœur du système avec le cumul occulte des présidences et des vice-présidences des différentes strates des mille-feuilles administratifs. Vache nourricière d’un parasitisme dévastateur. Derrière il y a le contribuable qui paye les frasques de cet indécent gaspillage. Et derrière encore il y a toutes ces ressources jetées en l’air, qui pourraient à la fois réduire la dette et être orientées vers l’investissement.
Aux armes citoyens ! On se fait égorger par le fromage. Une honte dans notre pays. C’est lui qu’il faut abattre.