Le conseil municipal du 30 juin 2010, ri-crack pour les délais, a approuvé le compte administratif pour l’exercice 2009. Dans la passion d’un soir d’été, alors que les lampions du 14 juillet s’allumaient déjà, et qu’un conseiller de la majorité jouait sur son ipad, tandis que ligne après ligne on apprenait tout sur l’année comptable écoulée. Ouf. Passé minuit, l’approbation aurait été hors délai. Même l’opposition a approuvé le compte administratif, ses conseillers voulant éviter de passer pour des billes, puisque en langage public il s’agit pour l’ordonnateur de rendre compte annuellement des opérations budgétaires qu’il a exécutées. Pas de quoi s’exciter, du coup tout le monde est resté calme.
Cela étant un chiffre doit retenir l’attention. En 2009, année de crise, année de serrage de ceinture, les charges de personnel de la ville auront augmenté de 1,99 %. Comme le disait le rapporteur, «c’est même moins que le glissement vieillesse technicité» – en langage kafkaïen- ou l’ancienneté en langage de tous les jours. Bref, on fait des miracles, et vous, vous pourrez faire des économies pour payer encore plus d’impôts dès la rentrée, et pour les exercices futurs. Parce qu’une telle progression dans une année de rigueur est le signe du creusement d’un manifeste déséquilibre. Les charges de personnel continuent d’augmenter et nécessairement vos impôts augmenteront, ou plutôt mécaniquement. Mais, dansez, braves gens, les socialistes nous disent tous les jours qu’il suffit de prendre dans la poche des riches pour tout payer. Les socialistes n’évoquent d’ailleurs jamais les ratios entre riches à tondre et besoin de financement.
Par exemple, quand on sait qu’à l’échelle de la France, la dette publique est dans l’ordre des Mille Cinq Cents milliards, que le déficit de cette année sera supérieur à Cent-Seize milliards, on prend peur. Le simple remboursement des intérêts représente le montant de l’impôt sur le revenu. Alors, on peut rêver. Les revenus des riches seraient tels qu’en les spoliant totalement, en leur laissant à ces salauds, qu’une chaussette et une moitié de slip, on pourrait raser gratis. Que nenni ! Dans ce type de proposition d’abruti alcoolique, même en oubliant que 1 % des contribuables supportent actuellement 37% de la charge de l’impôt sur le revenu, même en buvant 10 litres de bière, on ne peut réussir en leur piquant tout à payer les retraites, la vie chère, les déficits, la dette, les indemnités des élus. Même en étant fin saoul on n’y arrive pas. Même si on fait sauter le bouclier fiscal, aujourd’hui, on n’y arrive pas. Imbéciles. Et si on ratisse les entreprises, banque ou pas, d’une part elles voteront avec leurs pieds, d’autre part celles qui resteront seront plombées encore plus dans la compétition internationale.
Et si on n’est pas dans la compétition européenne et mondiale, si on dresse les barrières douanières, on deviendra aussi prospère que la Corée du Nord, ça vous dit la Corée du Nord ? Un îlot de prospérité communiste. Les mêmes abrutis qui proposent de taxer les riches comme recette miracle, généralement sont contre l’Europe, contre la mondialisation, contre la compétitivité. Et pour la Corée du Nord. Et vous ?
Si vous n’êtes pas pour la Corée du Nord, alors vous serez d’accord qu’il ne reste aucune autre solution nationale que la diminution des dépenses publiques. Il n’y a aucune autre solution locale que cette même diminution. L’État doit se concentrer sur ses fonctions régaliennes, et les collectivités locales doivent apprendre la parcimonie.
Ça sera dur au moment de la construction du palais de l’agglomération, un immeuble plus haut que les maisons, de dix étages et même davantage (Gérard Manset), une déraison.
À cette même séance du conseil municipal, il a été question du Programme de Réussite Éducative. C’est du social, du bon social. Il s’applique à la ZUS, où beaucoup d’enfants connaissent même mal la langue française. Dans ces conditions toute scolarité est vouée d’entrée à l’échec. C’est pourquoi il existe ce plan en interface entre l’école et la famille carencée. Ça ne coûte que 180 000 €. Aucun bénévole n’y participe, que des pros gravitant autour de l’éducation. Et ça ne coûte que 180 000 € au lieu de 225 000 € parce que ses animateurs ont su rester raisonnables. C’est bien sûr la faute du gouvernement, et c’est bien parce que je le soutiens que j’ai proposé que la différence soit prélevée sur les subventions qu’on accorde année après année à la CGT, à FO, etc. Plus social, on meurt.
Cela étant il y a un vrai problème.
Le problème est celui de la politique sociale d’une ville, gouvernée à gauche, dans un ensemble urbain gouverné par la droite, et qui ne pratique pas le social, du moins à la même échelle. Cette question a été abordée succinctement par M Borel, qui, sur la proposition de la mutualisation par l’agglomération de cette charge à caractère social, a aussitôt fait remarquer, en sa qualité de président, qu’Annemasse avait toujours été et est toujours en pointe sur toute la politique sociale. Et donc ajoutait-il, et il a raison, si on mutualise en faisant passer cette charge à l’agglomération, Annemasse perdra son leadership, et sans le dire, mais en le pensant très fort au point que cette crainte s’entendait, le résultat en serait à terme une baisse de l’effort.
C’est possible. Mais cela ne résout pas la seconde question qui émerge. Celle du cercle vicieux. Parce que la politique sociale, en isolat, conduit – comme Marie-Pierre BERTHIER le disait – à fabriquer les pauvres. En ce sens que le social attire les populations fragiles, qui à leur tour augmentent la demande. L’offre sociale créée la demande. Ce qui prend la forme d’un cercle vicieux, dans un environnement antisocial (c’est une caricature), où tout le social se fait à Annemasse, et où toute la population dans le besoin de ce social y conflue.
La solution est donc bien dans la mutualisation des efforts.
En attendant, et pour vous débarrasser, c’est vilain, mais vous êtes libres, de la lancinante musique de la nuit, tapez-lui sur la courge. En moins de dix clics, vous avez moins de deux grammes. Bon début, vous pouvez prendre le volant.