Lorsque l’on circule dans la région Annemassienne on est frappé par la continuité du tissu urbain de trois des douze communes formant l’agglomération: Annemasse, Ville-la-Grand, Ambilly. C’est à l’évidence un même ensemble urbain qui se déploie, sans césure.

De cette unité géographique, on pourrait conclure à la nécessité d’une unité politique et administrative. Pourquoi donc devrait-il y avoir dans ce même espace trois collectivités distinctes, alors qu’une seule suffirait amplement ? La réponse est d’abord dans l’histoire, dans le développement de l’urbanisme au fil du temps qui a soudé ce qui autrefois était séparé par des champs. L’extinction de la ruralité et l’émergence de l’urbanité sont les phénomènes marquants des 50 dernières années, ici, aussi bien qu’ailleurs.

Dans ce contexte la question politique se pose de savoir s’il faut poursuivre avec le schéma hérité du passé ou bien tirer les conclusions qui s’imposent éventuellement à l’examen de la réalité.

On peut hésiter, car il y a non seulement des pesanteurs, mais aussi un intérêt au maintien des communes.

L’argument généralement mis en avant pour opérer les fusions est celui de la rationalisation des moyens. C’est un argument intéressant, mais essentiellement bureaucratique, et qui présuppose que la concentration des moyens serait toujours source d’économie. La résistance ne serait dans cette perspective qu’une nostalgie inutile.

Il faut pourtant hésiter devant cette logique qui oublie aussi que plus on concentre les moyens, plus on centralise, et moins on obtient de productivité. Car c’est un mythe de penser que les grandes organisations bureaucratiques sont plus performantes que la juxtaposition de petites structures. Il y a dans tout système du «bruit», c’est-à-dire une perte d’efficacité. L’exemple a souvent été donné dans les grandes organisations des services de photocopies. Sur le papier la concentration de toute la production des photocopies dans un seul service est toujours pensée plus productive que l’éparpillement des services dans chacune des divisions. Et dans la réalité le modèle ne fonctionne pas et le grand service concentré est moins productif que les petites unités séparées.

Comparaison n’est jamais raison, mais il est assez clair que la fusion des communes n’aboutira pas nécessairement à des économies d’échelle en terme de fonctionnement des services. À tout le moins, cela reste à démontrer.

La vraie rationalité de la fusion des communes est avant tout d’ordre politique. L’enjeu est au fond de permettre l’identification d’un espace. Dans le cas d’un continuum urbain, un seul nom, une seule commune peuvent parfaitement se défendre. Mais cela reste discutable. En tout cas cela doit passer nécessairement par le consentement des citoyens intéressés.

(Je vote contre ! – pour l’instant, mais je peux changer).