Quelques jours après cette décision ubuesque de “suspendre“ les espaces d’expression des «groupes politiques » dans le journal d’information municipale (JIM), il devient possible de faire le bilan de l’expression politique annemassienne dans sa dimension communale.

Un rapide tour d’horizon des organes d’information qui s’intéressent à notre échelle communale permet de constater l’impressionnante carence de la plus élémentaire pluralité.

Toutes choses égales par ailleurs, une telle situation serait impossible dans l’espace national, et ne l’est que dans les quelques dictatures qui traînent encore aux quatre coins de la planète, de Cuba à la Corée du Nord, en passant par la Chine.

L’inventaire de l’offre médiatique à Annemasse est rapide :

–    absence quasi permanente des médias audio visuels qui ne s’intéressent à la ville qu’en de rares occasions,
–    présence de trois organes de presse : le Messager, le Dauphiné  – Libéré, et le Faucigny. Au total deux hebdomadaires, et un quotidien. Il faut y ajouter de temps en temps la presse genevoise.
–    Le JIM, mensuel luxueux dont le rédacteur est le maire, l’éditeur le maire, la mise en page assurée par les services de la mairie, et le contenu franchement subversif.

Inventaire terminé.

Sous l’angle de la pluralité et pour limiter l’observation à trois des quatre organes, le constat devient confondant.

Le Faucigny est à part. S’il manifeste constamment un sens critique suraigu, et transgresse parfois les limites que la prudence imposerait même à la polémique, ses deux autres frères en presse, le Messager et le Dauphiné, eux, ne risquent pas d’apparaître trop iconoclastes. Ils sont essentiellement respectueux des petits pouvoirs locaux, et ils ne donnent la parole quasiment qu’à leurs potentats. Pas bégueules, ils se contrefichent de savoir s’ils sont de gauche ou de droite, ce qui importe c’est qu’ils sont, et surtout qu’ils sont en place. Pas de vague, jamais de vague.

Il faut les excuser en cela uniquement qu’ils sont indispensables à la vie locale, et qu’ils doivent survivre économiquement, ce qui n’est pas une mince affaire pour cette presse qui ne peut pas en plus se payer le luxe d’exprimer une opinion au risque de fâcher une partie de son lectorat.

Reste le JIM. Fondé par Sa Majesté Borel 1er, il connaît aujourd’hui un développement en quadrichromie, et un nouveau Seigneur est à ses commandes. Le JIM c’est d’abord le journal officiel de la bananeraie annemassienne. Le pouvoir local s’y montre, s’y remontre, s’y étale, s’y donne en spectacle, s’y interviewe, s’y congratule.

Et c’est dans ce contexte que l’expression de la minorité se trouve suspendue. Ce qui serait drôle ce serait que le prochain JIM soit tout blanc. 20 pages blanches. Ou alors avec un seul bandeau : expression suspendue. Ça aurait de la gueule. La majorité offrirait pour la rentrée à tous les écoliers une liasse de papier, et en prime on la prendrait au sérieux quand elle annonce qu’elle suspend l’expression politique des groupes. Elle commencerait par elle même et dès lors renoncerait aux 20 pages intimistes de son expression mensuelle.

Mais ça ne se passera pas comme ça. Ils sont courageux, mais ils n’auront pas la témérité de se suspendre eux même.

Suite au prochain numéro…

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