C’est la rentrée !

Un grand malheur pour beaucoup d’enfants, et plus encore pour leurs professeurs, mais un vrai bonheur pour les éditeurs de livres scolaires. Côté politique les deux groupes d’opposition reprennent dans l’unité, ou presque, le chemin des dossiers. Les municipales sont pour 2014, c’est à dire demain. Il y aurait beaucoup à dire en ce mois de septembre sur l’état des lieux de notre commune : des travaux qui n’en finissent plus, la Place de la Libération va devenir une galéjade, une circulation paralysée et le pire est à venir, le rapide déclin du commerce de centre-ville,  sans parler  des projets de l’Agglo.

Dans la torpeur aoutienne, si la presse locale qui distille d’habitude des sujets hyper-estivaux noircit aujourd’hui des colonnes entières sur la construction d’une mosquée à Annemasse, c’est bien que sous le couvercle de l’été, la controverse met la ville en ébullition.

Parlons-en !

Qu’a donc fait le conseil municipal le 10 juillet 2012 ? Il a voté à l’unanimité de la majorité et de l’opposition sauf une voix, la vente d’un terrain appartenant à la ville, à l’association du Centre Culturel des Musulmans d’Annemasse pour la construction
d’une mosquée.

Les considérations pour lesquelles nous sommes en faveur de ce projet sont simple :

– la première, est celle de la liberté religieuse, qui est un principe sacré.

– la seconde, est celle de la laïcité consolidée dans le principe de la séparation de l’Église et de l’État, proclamé en 1905.

La conception française de la République opère une séparation entre l’espace public, et l’espace privé. Ce n’est que dans l’espace privé qu’il est possible de pratiquer la religion de son choix, dès lors que l’on ne perturbe pas le fonctionnement de la société.

– la troisième, est simplement celle de la dignité. Pratiquer sa religion, ce qui est le droit de chacun, suppose qu’on puisse le faire dans la dignité. La dignité s’habille de pierres quand il s’agit d’un lieu de culte. Ainsi le droit de pratiquer librement sa religion implique celui d’édifier le bâtiment destiné à en abriter l’exercice dans des conditions acceptables et accessibles à tous les pratiquants, soit 400 fidèles ou plus au moment des grandes fêtes.

Ce projet suscite de vives réactions dans une partie de l’opinion.

Il y a tout d’abord ceux qui reprochent à la ville d’avoir vendu un terrain exploité par un maraîcher. À cela il est répondu que ce terrain avait été acquis aux fins de constituer une réserve foncière, et que le bail consenti à l’exploitant maraîcher l’avait été à titre précaire.

Il est encore reproché au conseil municipal d’avoir modifié le plan local d’urbanisme pour ouvrir à la construction la parcelle dont il s’agit. En réalité la révision du plan local d’urbanisme est antérieure à la vente, et s’inscrivait dans la logique du plan. Ce secteur a été classé en zone UCa, c’est à dire une zone destinée à recevoir un habitat moins dense que dans le centre, en permettant la construction, de manière classique, des bâtiments destinés aux services collectifs.

Toute la polémique consistera à savoir si une mosquée entre dans les définitions du plan local. Plusieurs recours étant aujourd’hui engagés devant le tribunal administratif, le tribunal paritaire des baux ruraux, il n’est pas douteux qu’un nouveau recours soit porté devant les juges, qui répondront. Mais ces instances introduisent dans le projet une incertitude sur sa réalisation.

C’est sans doute pour cette raison qu’il est prévu à l’acte de vente la possibilité pour la ville de racheter le terrain dans un délai de trois ans. C’est la technique de la faculté de rachat, rarement utilisée en pratique, mais qui existe dans le Code civil.

D’autres critiques se sont également élevées, mais le terme de « critique » est ici un pur euphémisme. La réalité est toute autre, en fait ces reproches, parfois violents, sont dirigés contre l’existence même de la religion musulmane.

Il est de la liberté de chacun d’accepter ou de rejeter telle ou telle religion, il est donc permis de critiquer cette religion particulière, mais il ne peut être permis au nom de cette critique de l’interdire, d’en restreindre les modalités d’existence ou de la proscrire du paysage urbain. Le principe de la liberté dont nous jouissons tous oblige nécessairement à ne jamais la restreindre.

L’idée qu’il ne faut pas qu’il y ait de liberté pour les ennemis de la liberté est une contradiction qui tue le principe qu’elle veut défendre. Mais la liberté ne signifie pas que tout soit possible. Tout excès tombera sous le coup de la loi comme n’importe quelle infraction. L’excès est une affaire de police.

Nous sommes confiants sur l’usage que la majorité des musulmans fait et fera de la liberté religieuse en France. Les critiques reflètent souvent une angoisse profonde devant les brutaux changements de la société française. Les changements sont affaire de politique, on peut y applaudir ou au contraire les refuser. Mais la liberté religieuse, bien universel, est une tout autre question.

Le projet d’édification d’une mosquée ne date pas de juillet 2012. L’ancienne majorité et son 1er Magistrat Robert Borrel en avait fait une promesse de campagne il y a plus d’une décennie. Des contacts avaient d’ailleurs été pris avec le Conseil du Culte Musulman Rhône-Alpes, qui proposait une Charte précise encadrant notamment la construction de mosquée…. Mais comme la mairie ne parvenait pas à trouver de terrain, cette promesse sera réitérée lors des municipales de 2008.

L’affaire reste compliquée. Construire une mosquée pour les dix mille musulmans qui vivent dans l’agglomération, n’est assurément pas d’une extrême simplicité, notamment compte tenu des recours. Des questions comme celles relatives à l’accessibilité au terrain, dont l’entrée se fera obligatoirement par le giratoire ouvrant sur une circulation dense, ce qui impliquera l’aménagement d’un grand espace réservé aux parkings, peuvent faire capoter le projet en fournissant des armes devant les tribunaux.

Un affreux soupçon pourrait venir à l’esprit. Et si la vente de ce terrain n’était pas une manière de cadeau volontairement empoisonné ? Une sorte de piège électoral. Le terrain est vendu en 2012, mais les recours seront jugés en 2014, probablement après les élections municipales, si bien que même en cas d’échec du projet, les promesses auront en apparence été tenues.

François VIGNY & Jean-Pierre BENOIST, Manuel Augusto-Vaz, Caroline Duret-Nasr, Régine Ferdel, J.M JOULAUD, Louis Mermet

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